Appel pour une rencontre des formatrices et des formateurs en outdoor educationdes Hautes Ecoles Pédagogiques romandes

12 Sep 21
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DEUXIEME RENCONTRE : samedi 9 octobre 2021

09h00-17h00, Puidoux (Lavaux).

Inscriptions par mail

Le dedans et le dehors : la question du rapport au monde

Alors que l’humanité se confinait, la géographie de nos vies a soudain basculé. La question du dedans et du dehors s’est imposée à nous dans toute son essentialité. Ailleurs dans le monde, où le dedans et le dehors s’entremêlent bien davantage, la réalité a été plus cruelle que chez nous. Durant cette privation d’espace, beaucoup se sont questionnés-es sur leur rapport et leur usage du monde. De cette période ressortent certainement plus d’interrogations que de réponses. Mais une volonté de ressentir le monde, en particulier le monde « naturel », est apparue clairement et s’est traduite par un fort regain d’intérêt pour l’école dehors. Quand bien même ce courant nous apparaît positif, il n’en reste pas moins qu’il est encore fragile et très dépendant des prises de conscience individuelles et fortement variables dans leur contenu.

Au temps de l’Anthropocène, la question du rapport au monde est centrale dans la constitution d’un agir pédagogique. Il ne suffit pas de proclamer que notre rapport au monde doit être durable, fût-il fortement durable, pour que la question trouve une réponse transférable dans les pratiques professionnelles. Dans son ouvrage-clé « Résonance », Hartmut Rosa dit que le rapport au monde est d’abord physique, qu’il est une expérience. Pour travailler sur ce rapport au monde comme un objectif de formation et d’éducation, il faut donc « aller au monde », s’y ouvrir et se laisser toucher. Il faut passer le seuil de sa porte. C’est une démarche qui demande des aptitudes, des compétences, des savoirs spécifiques, mais aussi la volonté de repenser son rôle de professionnel de l’éducation. C’est une démarche qui exige non seulement du courage, car elle nous confronte à des choix de valeurs, mais aussi de l’intelligence, car il y a beaucoup plus à inventer qu’à reproduire. Enfin, c’est une démarche qui demande de la ténacité, du soin et une certaine idée du collectif. En effet, l’usage du monde qui s’impose aux jeunes aujourd’hui est problématique à bien des égards puisqu’il les oriente massivement vers la consommation du monde. Passer la porte de sa classe pour enseigner dehors est donc un pas, certes important, mais qui en appelle beaucoup d’autres pour que le pas se transforme en une démarche.

Le contexte positif d’aujourd’hui

L’enseignement dehors a donc le vent en poupe aujourd’hui. Une vague médiatique porte ces pratiques et les fait passer pour innovantes, bien qu’elles plongent leurs racines loin dans l’histoire de la pédagogie. L’aspect indéniablement positif est la constitution d’une communauté de pratiques. Du primaire au post-obligatoire, de nombreux-euses collègues sortent, de manière très différente et avec des objectifs variés, mais avec la volonté commune de donner le monde à voir, à comprendre et à ressentir aux élèves ou aux futurs-es enseignants-es. Il ne s’agit plus de pratiques isolées, même si le secondaire 1 est toujours minoritaire. Des réseaux et des associations se constituent, en ligne et dans le monde physique, pour échanger des trucs, des projets, du matériel. Le contexte est donc positif pour la pratique de l’école dehors. Les enfants papillonnent dans les forêts, sautent dans les flaques de boue, explorent les villes et les institutions de formation croulent sous les demandes de coaching. Des recherches nationales sont lancées et l’édition de livres sur les activités éducatives outdoor est pléthorique. Nous pourrions donc nous féliciter et en rester là.

De la nécessité d’approfondir les aspects didactiques et curriculuaires

Néanmoins, malgré ce bel élan, le contexte sociétal et écologique actuel est fort différent d’il y a 20 ans et ce qui relevait autrefois de l’éducation à l’environnement ou de la sensibilisation doit intégrer des concepts exigeants, tels que la complexité, la durabilité, les interdépendances, l’agentivité ou l’incertitude. Nous avons la conviction que faire sortir les élèves pour leur monter les traces du renard ou leur faire observer un arbre copain pendant quatre saisons ne sont plus des activités qui répondent, à une hauteur suffisante, aux défis actuels. Elles sont certainement un pas, mais pas encore la démarche. Si nous nous plaçons dans une optique curriculaire, nous devons élaborer des outils didactiques et des progressions qui permettent aux enseignants-es de faire avancer les élèves, année après année, dans l’élaboration d’un rapport au monde et dans la capacité à agir dans le monde. Actuellement, ces outils sont lacunaires ou manquent. Pouvons-nous envisager de ne plus nous cantonner à l’exempladans la formation et imaginer une vraie didactique de l’outdoor ? Quelles compétences spécifiques à l’outdoor souhaitons-nous développer chez les élèves au travers des cycles et, donc, quelles compétences professionnelles les praticiens-nes de l’outdoor doivent-ils maîtriser ? Comment traduire en activité de formation des progressions en outdoor ? Quelle forme et importance donner à l’évaluation ? Comment tisser les liens entre outdoor et durabilité ? Quelles formes d’outdoor sont pertinentes aujourd’hui ? Ces questions sont toutes ouvertes et demandent à être réfléchies si l’on veut que la vague positive qui nous porte actuellement puisse durer. De plus, vu la diffusion rapide de la pratique de l’école dehors et l’augmentation du nombre de collègues qui deviennent experts-es, le partage et l’analyse de nos pratiques revêtent un grand intérêt.

De la nécessité de (re)discuter des bases philosophiques de notre pratique

Interrogés par les médias sur l’objectif de l’école dehors, nous répondons souvent qu’il s’agit de retisser un lien entre les jeunes et l’environnement. Or, qu’entendons-nous aujourd’huipar nature, par environnement ? Peut-on encore parler de nature dans une forêt de piste Vita en périphérie d’une zone industrielle ? Et comment définir le lien avec la « nature» que nous souhaitons mettre en avant dans nos formations ? Est-ce un lien empathique, résonnant, résistant, fonctionnel, décroissant, cognitif, émotionnel ? Dans nos modules nous mobilisons de multiples valeurs, ainsi que des systèmes de pensée que des philosophes, des anthropologues, des sociologues ou des historiens-nes et des géographes questionnent aujourd’hui. Pour avancer professionnellement, pourrions-nous nous saisir de ces discussions, de ces théories et les mettre en regard de nos pratiques ? Ce sont des débats passionnants et ils pourront nourrir durablement nos formations à l’enseignement dehors.

De l’avantage de construire une perspective régionale pour l’outdoor

Malgré toutes les formations possibles qui sont offertes aux enseignants-es ou aux animateurs-trices et médiateurs-trices environnementaux-ales, il n’existe néanmoins pas de formation complète qui se développerait tel un curriculum pour l’outdoor au sein des HEP. Certaines de nos formations sont très axées sur la forêt, la « nature », d’autres plus sur des dimensions de développement personnel ou alors intégrées aux didactiques disciplinaires. Pour que notre approche pédagogique puisse se développer et devenir autre chose qu’un ajout pour les beaux jours, elle doit constituer ses bases didactiques, épistémologiques et les organiser. Les expériences en Suisse romande peuvent communiquer et s’enrichir mutuellement, car le cadre institutionnel est assez semblable et homogène. Si nous pratiquons l’outdoor dans des contextes géographiques très différents, les contextes et enjeux de formation sont assez semblables (p. ex. la triade durabilité, numérique, inclusion est au programme dans toute la Suisse romande), il est donc intéressant de bâtir des ponts, au moins intellectuels et pourquoi pas pratiques, entre nos berges.

De la nécessité d’avoir un espace et un temps pour la réflexion et pour notre propre formation

Un certain nombre d’événements sont organisés, chaque année, par Silviva, le WWF, l’association En Dehors ou par les HEP autour de l’enseignement dehors. Néanmoins, il y a un besoin de réflexion générale qui va au-delà de ces moments d’échange. Une communauté de pratiques est en train de se constituer et il serait indéniablement profitable qu’elle puisse disposer d’un espace régulier pour développer ses idées, les confronter, élaborer ses cadres théoriques et ses questionnements.

La HEP Vaud s’est dotée d’un centre de compétences en outdoor education qui a organisé deux journées d’étude en octobre 2020 auxquelles vous avez peut-être pris part. Un des objectifs de ce centre est de favoriser les synergies entre les acteurs de la formation. Nous souhaitons donc prendre l’initiative de vous inviter à une première rencontre en vue de la constitution d’un groupe romand des formateurs et formatrices HEP en outdoor education. Plusieurs réseaux larges existent déjà et ont pour but de visibiliser les pratiques, notre proposition n’est donc pas de créer un réseau supplémentaire où l’on échange une fois par année sur les projets en cours. Le réseau Ecoledehors.ch lancé par Silviva et le WWF ce mois de janvier devrait jouer ce rôle d’interface d’échange large. Nous vous proposons de construire plus spécifiquement un groupe d’étude qui s’intéresserait aux questions didactiques et de formation. Nous en avons besoin, car si nous formons les futurs-es enseignants-es, il n’y a pas de formation au niveau tertiaire, une formation de formateurs hep. Nous avançons toutes et tous avec nos propres moyens, nos connaissances, nos expériences, nos lectures. Un groupe romand devrait aussi permettre de nous former mutuellement. Ce groupe pourrait donc avoir comme objectifs :

Nous espérons que cette – longue – proposition aura éveillé votre intérêt et que nous aurons l’occasion d’avancer ensemble sur ce sentier.

Pour le Centre de compétences en outdoor education

Ismaël Zosso

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